– Comment en êtes-vous venu à collaborer avec la Croix-Rouge en tant que bénévole? Je ne savais pas qu’il y avait des gens actifs au sein de la Croix-Rouge dans notre région.
– Je vous rassure, je ne le savais pas non plus ! Un jour j’effectuais un trajet en train pour me rendre à Berne, où j’ai travaillé durant trente ans au sein de l’Union Postale Universelle (UPU), organisation affiliée à l’ONU. J’ai discuté avec un ami qui faisait régulièrement les trajets avec moi. Je lui ai dit que j’approchais de la retraite et que je cherchais une occupation en tant que bénévole. Comme je fais de la moto, je voulais être à l’œuvre dans la sécurité pour les cyclistes lors des courses de vélo. Avec ma machine, j’ai participé au Tour de Romandie, ou encore au Tour du Jura, au niveau de l’escorte. Mais ça c’est surtout le week-end, il me fallait donc une autre occupation durant la semaine. Et en parlant de ça, le gars me dit : « La Croix-Rouge cherche tout le temps des chauffeurs, et sur Moutier il n’y en a pas beaucoup. » Puis il m’a informé qu’il était vice-président de la Croix-Rouge sur le Jura bernois ! En prenant ma retraite, je me suis donc rendu aux bureaux de la Croix-Rouge à Tavannes, et je me suis présenté. Mais je leur ai dit que je voulais effectuer seulement deux transports par semaine, parce que j’ai passablement de choses à côté, et surtout ma famille et mes petits-enfants.
– Combien de chauffeurs êtes-vous à Moutier et dans le Jura bernois?
– Actuellement nous sommes cinq sur Moutier et environ septante dans le Jura bernois. Je couvre toute la région, mais j’accepte aussi de faire des déplacements dans d’autres cantons. Une fois, je me suis rendu au CHUV à Lausanne, je me déplace régulièrement à Berne, mais aussi à Bâle, à Delémont, à Laufon.
– Avec quel genre de véhicule vous déplacez-vous?
– Avec ma voiture personnelle. Je vais chercher les patients à domicile, et je les emmène chez leur médecin, chez le dentiste ou le physio, etc. Suivant où c’est, je les attends sur place. Parfois c’est assez près de chez moi, alors je rentre et j’attends l’heure à laquelle je peux aller les chercher. Mais si je me rends par exemple à Berne à l’hôpital, je reste sur place ; dans ce genre de cas l’attente peut durer deux ou trois heures.
– Quelle est la moyenne d’âge des patients que vous emmenez aux rendez-vous?
– Ce sont le plus souvent des personnes âgées à mobilité réduite, qui ne peuvent ni conduire ni prendre les transports publics, ni se faire conduire par un proche. Mais il y a aussi des plus jeunes. Il peut y avoir des enfants accompagnés de leur maman, mais c’est quand même rare. Parfois des proches aidants viennent avec nous : ils connaissent le patient, et savent comment réagir si une difficulté se présente. Les chauffeurs ne sont ni médecins, ni infirmiers. D’ailleurs, si on remarque qu’on transporte quelqu’un qui aurait été capable de prendre le train, ou qui aurait pu conduire, on le mentionne dans le rapport que nous établissons après chaque transport.
– Comment doit procéder un patient de la région qui a vraiment besoin de ce service?
– Il contacte la Croix-Rouge Jura bernois à Tavannes. Il donne le lieu de rendez-vous chez lui, le lieu de destination et combien de temps il devra rester sur place. C’est Tavannes qui contacte ensuite les chauffeurs. Les gens ne peuvent pas contacter directement un chauffeur. Tavannes nous envoie ensuite un courriel qui est une proposition, dans le sens où nous pouvons refuser ou accepter. Si par exemple ça ne joue pas pour moi, ils contactent quelqu’un d’autre. Si j’accepte, j’ai une application sur mon téléphone avec laquelle le centre peut donner toutes les informations sur la personne et sur le lieu de destination, y compris l’info si elle a des béquilles ou si elle utilise une chaise. J’ai de la place dans le coffre de ma voiture, alors ça ne pose pas de problème. A côté des adresses livrées par le centre, il y a un lien sur Google Maps pour nous guider via GPS : le système est très pratique et bien fait. Sur le tableau de bord de la voiture, nous plaçons une carte de format A5 de la Croix-Rouge qui spécifie que nous sommes des bénévoles de l’organisation. Nous avons aussi une carte « handicapé » établie au nom de la Croix-Rouge, qui nous autorise à nous parquer sur des places réservées aux personnes handicapées. A Bienne par exemple, c’est top, parce que nous avons le droit de nous parquer n’importe où sans payer.
– Les chauffeurs sont-ils défrayés?
– Nous sommes défrayés pour les kilomètres parcourus, et aussi si nous devons manger lors d’engagements plus longs, qui durent par exemple quatre ou cinq heures. Cela dit, nous ne sommes pas défrayés pour le temps investi. C’est la Croix-Rouge qui facture aux patients, et ils peuvent être remboursés par leur assurance complémentaire.
– Comment définissez-vous le bénévolat?
Etre un chauffeur bénévole de la Croix-Rouge, ça veut dire que l’on donne de notre temps. Il faut savoir être patient et faire preuve d’écoute, d’empathie et de compréhension. Lors d’un trajet plus long, les patients vous racontent leur vie, leurs problèmes, leurs souffrances. Ils s’ouvrent à vous, et le récit est parfois très triste. Il faut donc être solide, équilibré. Mais une fois de retour à la maison, on tourne le bouton et on pense à autre chose. C’est important.
Propos recueillis par Pablo Davila