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Epaté par le savoir-faire prévôtois

Edition N°29- 12 août 2020

Pascal Crittin : «J’ai trouvé très puissant le regard de Bertrand Theubet porté sur cette mécanique prévôtoise. On n’a pas tout ça ailleurs !» (photo Roland J. Keller)

Le 26 juin dernier, le directeur de la RTS Pascal Crittin était de passage au Cinoche de Moutier. Lors de la présentation du film «Les héros du tour» de Bertrand Theubet (réalisateur) et Jean-Marie Gindraux (producteur), le Valaisan a été conquis par le savoir-faire de ces décolleteurs et par la qualité du documentaire projeté. Retour sur ses impressions en marge de la pandémie et de ses activités à la RTS.

Moutier et sa région, Pascal Crittin les connaît bien. «Oui, oui. Je viens souvent dans le Jura et le Jura bernois», confie le directeur de la Radio télévision suisse (RTS). Aux commandes depuis le 1er mai 2017, ce Valaisan d’origine (Saint-Maurice) a repris les rênes d’une chaîne en pleine restructuration : économies à réaliser en 2020 suite à la nouvelle redevance radio-TV (Serafe), transfert de l’actu à Lausanne et crise de la covid-19.

Entre chœurs et télé

Pascal Crittin a succédé à Gilles Marchand lequel est devenu directeur général de la Société suisse de radiodiffusion (SSR). A 51 ans, le nouveau directeur de la RTS connaît bien les rouages de la grande maison télévisuelle romande puisqu’il y a déjà œuvré durant 15 ans, dirigeant notamment la radio Espace 2. Toutefois, il cumule d’autres casquettes : président de la Chaîne du bonheur, membre de l’Union européenne de radio-télévision, vice-président des Médias francophones publics et membre du conseil de la Fondation Fonsart (pour la sauvegarde du patrimoine). Rien que ça ! Licencié en lettres et en musicologie de l’Université de Fribourg, il pratique encore le piano, l’orgue et l’art choral. Un domaine qui d’ailleurs a pris une part décisive dans sa vie où il a dirigé et fait évoluer les meilleurs chœurs de Suisse romande.

– Monsieur Crittin, quelle a été votre motivation à voir ce film ?

– C’est une longue histoire. Lorsque Bertrand Theubet m’a transmis son projet, il y a trois ans, je me suis dit qu’il fallait le soutenir tellement le sujet était original, à l’image de ces tours automatiques et toute cette industrie de la Prévôté. On n’a pas tout ça ailleurs ! C’est vraiment une spécificité romande.

– Quels sont les soutiens de la RTS pour les cinéastes ?

– On essaie toujours de soutenir des projets à propos du patrimoine romand. J’étais donc très attaché par celui de Bertrand Theubet, et, à Moutier, je voulais découvrir en salle obscure le résultat final pour encore mieux m’approcher du public. D’ailleurs, la RTS cofinance fréquemment ce genre de documentaire pour le cinéma, la fiction, les séries TV, etc…

– Comment avez-vous apprécié le film ?

– J’ai été séduit par l’amitié de ces six copains mécanos et l’amour qu’ils ont pour leurs machines; le film en devient très attachant. J’ai aussi trouvé magnifique le passage entre générations des anciens aux jeunes qui transmettent leur savoir-faire, leur passion. J’avais presque envie d’apprendre ce métier. Quarante-neuf ans d’entreprise pour l’un de ces décolleteurs, c’est incroyable de nos jours. Cette fidélité m’a beaucoup touché.

– Et le scénario ?

– Très beau, le travail de Nicolas Chèvre, cameraman, avec les gros plans et les travellings. On a l’impression de tourner autour des machines comme on admire un monument. J’ai aussi trouvé très puissant le regard porté par Bertrand Theubet sur cette mécanique.

– Revenons à votre job. Comment gérez-vous vos activités en ces temps de crise ?

– Cela se passe bien. Comme tous les médias, on a plein de défis, car on doit se positionner abondamment sur le digital. On doit réinventer nos façons de produire, nos formats et la manière de toucher le public qui s’est éloigné de la radio-TV. Donc, je suis heureux d’évoluer dans cette perspective très dynamique.

– Comment avez-vous passé cette crise de la Covid-19 ?

– On a tout réinventé le métier en une semaine !

– C’est-à-dire ?

– A la RTS, nous sommes 1800 collaboratrices et collaborateurs. Mais, lors du confinement, nous avons dû renvoyer 1500 personnes à la maison, du jour au lendemain ! Ainsi, on a produit 80% de contenu radio et 60% de TV à domicile tout en laissant plus de 300 personnes sur les sites. On s’est enfermé, quoi ! De plus, nous avons dû réinventer tous les gestes professionnels en raison des distances de sécurité.

Comment réaliser des émissions lorsqu’il n’y a plus de sport, plus de culture, plus d’événements ?

– Il a fallu réinventer de nouvelles émissions comme Antivirus ou celles pour les enfants. Et on a lancé tout ça en 3 jours ! C’était une très belle expérience de créativité et on a beaucoup appris pour savoir comment faire autrement.

– Et maintenant, où en êtes-vous ?

– Les affaires reprennent, tout redevient quasiment normal, sauf, que, évidemment, il y a beaucoup de contraintes, telles des annulations d’événements. Sans oublier que nous avons encore des collègues qui pointent au chômage technique.

– Que vous a apporté cette crise ?

– Cela nous a beaucoup soudés. On s’est rendu compte qu’on est capable de la traverser ensemble. On a aussi beaucoup appris de la manière de travailler plus simplement, plus rapidement, et de décider plus vite les choses. On a beaucoup délégué et gagné davantage en souplesse.

– Concrètement ?

– Au lieu de se déplacer pour aller filmer les gens, on a davantage réalisé des visioconférences. Nos employés ont beaucoup travaillé en solo sur le terrain. Les collègues du sport se sont déplacés dans les régions comme Christophe Cerf pour couvrir les actualités avec des regards nouveaux. Tout cela a été très enrichissant.

Propos recueillis par Roland J. Keller

 

Deux avant-premières au Cinoche

Le film «Les Héros du Tour» sort le 19 août au Cinoche de Moutier, mais deux avant-premières sont programmées les 15 et 16 août au même endroit. D’autres projections sont prévues dans le Jura – le 7 octobre au CinémAjoie de Porrentruy – ainsi que dans le Jura bernois à des dates encore à confirmer.

(rke)

Pascal Crittin : «J’ai trouvé très puissant le regard de Bertrand Theubet porté sur cette mécanique prévôtoise. On n’a pas tout ça ailleurs !» (photo Roland J. Keller)