Portraits

« Avant, on osait l’audace ! »

Edition N°2 – 19 janvier 2022

Clin d’œil au passé – André Petit (Pontenet)

Doyen de Pontenet, André Petit (93 ans) parle de son village natal avec des étoiles dans les yeux au moment d’évoquer le passé. La loi de la modernité, qui est à l’origine d’un appauvrissement progressif de la vie sociale par la nette diminution des agriculteurs et la fermeture d’usines, de magasins, de la poste, etc., relègue le village au rang de cité dortoir, ce qui atténue passablement son enthousiasme. Rencontre avec un féru d’histoire à la mémoire infaillible.     

« Je suis né ici en 1929 », explique André Petit au moment d’accueillir le soussigné dans sa maison de Pontenet, complètement rénovée en 1979-1980. « Il ne restait plus que les quatre murs et le toit », confie-t-il. Consciencieux dans l’âme, cet ancien employé de bureau a préparé quelques notes marquées du sceau de la pertinence et de la poésie en prévision de notre entretien. « Situé au centre de la Vallée de Tavannes, bâti sur un replat au pied du Moron, calme et coquet, blotti dans la verdure, Pontenet nargue le soleil en l’empêchant de fabriquer de l’ombre. Petit par la superficie de son territoire et par sa population, le village a su garder son aspect rural grâce à ses belles maisons anciennes datant de 1673 à la fin du 18e siècle.

Un nouveau quartier de villas, magnifiquement situé dans la partie nord-est de la localité, a vu le jour à partir des années 1970. Lorsque l’on suit la route cantonale qui longe la Birse et que l’on traverse la « zone industrielle », on peine à croire qu’à une encablure se cache, là sur la hauteur, un si joli hameau. » Dans les années 1930-1945, Pontenet comptait encore une quinzaine d’agriculteurs. Aujourd’hui, il ne reste plus que la famille Mornod, de la ferme du Beurnez, qui propose des produits du terroir. Le secteur industriel a lui aussi connu ses heures de gloire à Pontenet : « La fabrique d’ébauches Meyer occupait entre cinquante et soixante personnes. C’est toute ma jeunesse. Mon grand-père, mon père ont travaillé là. Ma mère aussi mais elle s’attelait à ses diverses tâches depuis son domicile », souligne André Petit. Ebauches SA a repris le bâtiment mais comme cette entité a mis le cap sur Reconvilier, c’est l’entreprise Léon Charpilloz Décolletage qui a racheté le bâtiment de Pontenet. Dans les années 1950, on assiste à la saga Tana qui comptait deux sociétés bien distinctes sous le même toit, soit Tana Plastique et Tana Décolletage. Ses activités ont progressivement diminué. Une partie du bâtiment abrite aujourd’hui l’entreprise de tréfilage et profilage La Cible, fondée en 2004 par Robert Habegger.

Un festival inoubliable

André Petit se souvient de l’époque où son village dénombrait quatre magasins, soit une boulangerie-alimentation ; la Consomme (alimentation) ; une épicerie-mercerie et une laiterie. Le restaurant Blumenau (actuellement La Gare) accueillait les lotos de la société de tir et du chœur d’hommes. « En 1952, Pontenet, par le biais de son chœur d’hommes justement, a organisé le festival du district avec un cortège. Une grande place avait été aménagée à proximité du stand de tir. Ce festival regroupait des chœurs d’hommes, des chœurs mixtes et des fanfares.

Organisée annuellement devant le Blumenau, la fête des jardins recueillait également un vif succès. « Ce jardin existe encore aujourd’hui. La famille Blanchard veille à préserver une certaine attractivité pour le bonheur des petits et grands avec un étang, un moulin et des petits animaux », relève le doyen de Pontenet. Parfois victime d’un méchant coup de blues en repensant à l’époque des Trente Glorieuses qui alliaient prospérité, découvertes et audace, André Petit se réconcilie avec le présent lorsqu’il évoque le musée du Neuf Clos aménagé par Pierre-Alain Girard dans une ferme jurassienne typique datant de 1697. Voyage didactique, documents anciens, jeux, images, arts, traditions populaires : c’est un véritable bijou qui vaut assurément le détour.

Univers apaisant    

Depuis le 1er janvier 2015, Pontenet est englobé dans la commune de Valbirse avec Bévilard et Malleray. Une question, un brin indiscrète, nous taraude l’esprit. Pour ou contre la fusion, André Petit ? « J’y étais favorable tout simplement parce que les bonnes volontés manquent dans la société d’aujourd’hui. Il devient de plus en plus difficile de trouver des personnes dévouées prêtes à s’investir pour la collectivité publique. Les jeunes, dans leur grande majorité, ne veulent plus se mouiller. Quand on leur parle d’assumer une charge, ils ne sont plus là. »

Passionné par le ski, les fleurs, le jardinage, l’entretien des arbres et des vergers, cet ancien membre de la société d’arboriculture du village coule une paisible retraite dans sa maison de Pontenet aux côtés de son épouse Marlène et entouré de sa famille (deux filles, cinq petits-enfants et cinq arrières petits-enfants). On l’écouterait pendant des heures narrer histoires et anecdotes sur les riches instants qui ont nourri une existence basée sur des valeurs essentielles comme le respect, la tolérance et l’humilité. Et malgré ses 93 ans, il est toujours hardi, Petit ! Quelle grandeur d’âme, mes amis !

Olivier Odiet

 

Clin d’œil au passé – André Petit (Pontenet)