Portraits

La nouvelle vie de Rudi Geiser

Edition N°42 - 11 novembre 2020

Rudi Geiser rêve d’ouvrir une académie pour soutenir et conseiller des pilotes de renom. (photo Walter Wermuth)

Trente ans après avoir épaulé, conseillé et managé de prestigieux trialistes internationaux et helvétiques, Rudi Geiser veut orienter sa carrière vers de nouveaux horizons. Après avoir bourlingué dans une septantaine de pays pour accompagner et soutenir ses poulains, le Tramelot souhaite se consacrer davantage à la formation de jeunes pilotes renommés pour mieux leur apprendre les ficelles du métier.

Des lattes aux deux roues, la vie démarre au quart de tour. Rudolf Geiser, devenu Rudi pour la vie éternelle, a toujours su garder la fibre paternelle. Il y a cent ans, son grand-père Christian confectionne ses premiers skis en bois de frêne et de hickory, connu aussi sous l’appellation de noyer blanc. Une matière naturelle très dure, mais flexible, qui a servi autrefois à confectionner des manches d’outils, des bâtons de golf ou des lattes de ski. « C’est aussi une sorte de chêne américain haut de gamme qui, très gras, glisse bien dans la neige. A l’époque, pour conserver la forme un peu incurvée des lattes, il fallait plier le bois à la vapeur », souligne Rudi. Une technique qui requiert le savoir-faire manuel d’un maître charron, un artisan spécialiste du bois et du métal d’autrefois.

Un grand-père ingénieux

Avec ingéniosité, Christian Geiser invente l’un des tout premiers systèmes de fixation de ski avec des sangles en cuir muni d’un ressort et breveté à l’usine Boillat de Reconvilier. L’affaire prend de l’ampleur, mais la fabrication de skis n’est pas rentable pour autant. Pour survivre, la famille Geiser doit continuer son train de paysan à la ferme. Rudi junior (son papa s’appelle aussi Rudi et sa maman Vreni) reprend alors une activité qui roule, non pas sur l’or, mais bec et ongles sur le savoir-faire. Le magasin de ski qu’il reprend à la Grand-Rue 39 de Tramelan fêtera ses cent ans l’an prochain. Avec deux CFC en poche, de vendeur et de gestionnaire de vente, Rudi Geiser continue son petit bonhomme de chemin sur deux roues. « J’ai toujours eu une passion à côté. C’est la moto, de route et de trial. Cependant, j’ai vite constaté que je n’avais pas la fibre d’un champion, mais d’organisateur », souligne-t-il. Du coup, il prend en main les destinées de Cédric, Didier et Jérémy Monnin qui se sont illustrés, en élite, quatre fois au niveau national : « Je m’occupais de leur dénicher des sponsors, des fournisseurs de pièces et même des motos. »

D’Yves Briguet à Noé Pretalli

Rudi Geiser devient alors une aide appréciable et précieuse des pilotes en manque de notoriété sportive. Au milieu des années nonante, le Tramelot s’occupe des saisons d’Yves Briguet devenu champion du monde en moto super-sport. « C’est là que j’ai appris les ficelles du métier pour monter un team international. » En 2012, il s’occupe de l’organisation du trial des Nations de Moutier où pas moins de 22 nations ont participé. En 2014, il prend en main la carrière sportive de Noé Pretalli, devenu, comme on le sait, quadruple champion de Suisse élite. « Je lui avais déniché un fabricant de motos de petite marque, Jotagaz, issue du septuple champion du monde, Jordi Tarrès, avec 61 victoires en Grand Prix », précise Rudi. Fort de son expérience de soutien de sportifs, il fonde RG Trial, qui lui donne les fondements pour épauler, entre autres, l’Espagnol Gabriel Marcelli qui obtient le titre de champion du monde et d’Europe de Trial 2, l’an passé. Après avoir bourlingué à travers une septantaine de pays durant plus de trente ans pour accompagner et soutenir ses protégés, Rudi Geiser a tout fait et tout vu. Vraiment ? « Oui, en tous cas dans ce domaine international. Par exemple, je n’aurais pas les reins assez solides financièrement pour accompagner Marcelli encore plus loin. Je le vois champion du monde l’an prochain en trial GP. »

Une académie et un musée itinérant

A 59 ans, le Tramelot prend une retraite internationale tout en gardant son team RG Trial, qui a mené ses sportifs aux sommets mondiaux du Trial 2, d’Europe, de Suisse et d’Allemagne. Alors, fini de faire le manager ? « Non, non. Je vais d’abord prendre un temps de recul. Je rêve d’ouvrir une académie pour soutenir et conseiller des pilotes renommés afin de leur apprendre comment dénicher des sponsors, se présenter aux médias, mais aussi respecter le matériel. »

Ce qui vous ramènerait de nouveau à l’international ? « Oui, mais dans la perspective d’être un conseiller et un formateur, plutôt qu’un manager. Quoique… » Rudi Geiser ne cache pas qu’il souhaite aussi remontrer son exposition de ski itinérante, dont il conserve fièrement 300 paires de 80 marques datant des années vingt à nos jours. Une bonne occasion de ressortir ses lattes ? « Ma foi, on verra… »

Roland J. Keller

Rudi Geiser rêve d’ouvrir une académie pour soutenir et conseiller des pilotes de renom. (photo Walter Wermuth)