Les meilleurs cervelas de Suisse sont fabriqués à Moutier et cette aubaine n’a pas échappé aux bourgeois du cru, qui en feront la vedette de leur journée nationale des bourgeoisies le 14 septembre prochain. Et comme un cervelas n’est jamais aussi bon que lorsqu’il est grillé sur la braise, les bourgeois de la Prévôté offriront à leurs convives non seulement les fières petites saucisses, mais également des accessoires surprise, afin que chacun puisse réaliser ses grillades sans risque de se roussir les poils. Fidèles à l’esprit de cette première « Journée nationale des bourgeoisies », celle de Moutier offrira, en plus des cervelas, de quoi étancher les soifs les plus rebelles afin que la fête soit encore plus belle.
Se familiariser
Les sept postes du parcours seront l’occasion de questionnaires sur la bourgeoisie et ses différentes fonctions. « Il n’y aura pas de vilaines colles, assurent en chœur Marcelle Forster et David Gobat, respectivement vice-présidente et président de bourgeoisie. Nous avons opté pour un niveau accessibles aux enfants, afin qu’ils découvrent en s’amusant ce que représente une bourgeoisie dans la société moderne. » Celle de Moutier possède quelques bâtiments et loges, mais là n’est pas l’essentiel. Elle est surtout propriétaire de près de 90 % des forêts du territoire communal, ainsi que de plusieurs parcelles de pâturage boisé et de terrains séchards de grand intérêt pour la biodiversité.
De grands propriétaires terriens sont forcément riches entend-on souvent dire, les septante-quatre ayants droit de la commune bourgeoise sont-ils assis sur un confortable pactole ? « Certes non, sourit Marcelle Forster, il s’agit en très grande majorité de forêts protectrices, tant à l’endroit (montagne de Moutier et gorges) qu’à l’envers (Graitery). La bourgeoisie ne peut l’exploiter et l’entretenir que dans le cadre de cette fonction de protection contre les éboulements, ou d’éventuels glissements de terrain tels qu’on peut les craindre avec le dérèglement climatique. » Elle a passé des contrats, notamment avec les CFF et le service des autoroutes, afin que ses forêts protègent au mieux les voies de communication. « C’est en raison de leur forte déclivité que nos boisements doivent assumer ce rôle et cela implique de facto que leur exploitation est difficilement rentable, tant elle nécessite de moyens techniques », ajoute Marcelle Forster.
Le président hoche du chef et ne manque pas d’ajouter que bostryches et sécheresses ont fortement contribué à la dégradation des épicéas mais aussi des hêtres. Pour faire tinter un peu la tirelire, il reste heureusement l’estivge de génisses. « Elles viennent du Plateau bernois, d’Argovie et aussi d’Ajoie », conclut David Gobat.
Le Jurassic Park des bourgeois
La région jurassienne regorge de sites qui rappellent le temps où des dinosaures parcouraient notre région dans un paysage qui devait ressembler aux Bahamas ou à d’autres chapelets d’îles tropicales. Ces énorme animaux appartiennent désormais au monde très sérieux de la paléontologie et à celui, beaucoup plus poétique, des rêves d’enfants. Grâce aux travaux de l’A16, l’Ajoie a été le lieu de découverte d’innombrables empreintes qui ont été largement documentées avant d’être pour la plupart recouvertes. Moutier est l’autre haut lieu des dinosaures. Les terres de la bourgeoisie comptent deux sites où l’on peut admirer les marques de pas de ces géants du Jurassique. Ici dans le Jura plissé, la tectonique des plaques a fait son œuvre, les pentes jurassiennes sont apparues il y a des dizaines de millions d’années, à la suite de l’érection des Alpes. Gravées dans le calcaire, les empreintes laissées sur des plages boueuses sont actuellement visibles dans les Gorges de Moutier et vers le chemin de la Montagne de Moutier, sur des dalles inclinées désormais parcourues par les seuls chamois et varappeurs.
Mais pour les paléontologues, le meilleur avait été découvert dans une carrière abandonnée dominant les gorges, de laquelle on avait extrait les pierres nécessaires à la construction de la collégiale dans la seconde moitié du XIXe siècle. C’est là que des ouvriers avaient mis à jour des vestiges de dinosaures, une dent de prédateur et des ossements d’une espèce d’herbivores qui n’a encore été trouvée nulle part ailleurs, Amanzia greppini. Le tout mêlé à des ossements de proto-crocodilien. Ces vestiges sont propriété du Musée d’histoire naturelle de Bâle.
Blaise Droz