Dès le départ, la course est nerveuse. Les cinq premiers kilomètres sur route permettent au peloton de se caler, et Carole se positionne en deuxième ou troisième rang. Tout semble fluide jusqu’à ce que les hommes de la catégorie +65 ans, partis une minute après, rattrapent les dames. Le rythme change brutalement, la tension monte : il faut se glisser dans les roues, anticiper chaque virage, chaque relance, chaque mouvement du terrain. « C’était ultra intéressant, mais aussi très tendu, presque dangereux si on réfléchit trop », confiera-t-elle plus tard. Et puis, au trentième kilomètre, le coup dur : une crevaison arrière. Cinq minutes d’arrêt pour réparer. En un instant, Carole passe de la tête de course à la queue. L’agacement est palpable, mais la détermination prend le dessus.
« J’ai roulé fort, sans jamais m’arrêter », raconte-t-elle. Avec ténacité, endurance et volonté, elle reprend des places, dépasse des groupes, remonte au classement. La Suisse avance, concentrée, implacable, jusqu’à franchir la ligne d’arrivée en 9e position.
Un résultat frustrant, tant le podium était à portée, mais une course riche d’enseignements. Carole le sait : même les plus grands connaissent des jours où tout ne se déroule pas comme prévu. L’essentiel, c’est la manière de réagir. « Se battre pour revenir, c’était passionnant et formateur », glisse-t-elle, lucide.
Cette ultime course vient clore une saison 2025 remarquable. Carole Perrot, triathlète accomplie, s’est illustrée cette année dans les plus hautes sphères du cross-triathlon. Aux Championnats du monde de Pontevedra, elle a décroché le titre dans sa catégorie d’âge (45-49 ans) et le classement scratch féminin hors élite, confirmant son statut d’athlète de haut niveau. S’y ajoutent des podiums en Suisse et à l’international, notamment sur le circuit XTERRA, où elle brille depuis plusieurs saisons, en y décrochant là aussi, à Molveno il y a trois semaines, le titre suprême de championne du monde 2025 chez les dames 45-49.
Polyvalente et constante, Carole maîtrise aussi bien la nage que le vélo ou la course à pied. Sur tous les terrains, elle allie rigueur, instinct et passion. Son engagement sans faille inspire le respect : elle s’entraîne dur, gère chaque détail et aborde chaque compétition avec la même intensité.
Une leçon d’endurance et d’humilité
Cette course de gravel restera dans son parcours comme une expérience de plus, une étape de construction. Carole Perrot l’aborde avec l’esprit d’une athlète complète : la crevaison, la remontée, l’effort solitaire, tout cela forge le mental. Et dans le sport, comme dans la vie, la valeur d’un athlète se mesure aussi à sa capacité à rebondir. Le podium lui a échappé cette fois, mais la victoire est ailleurs, dans cette faculté à transformer la déception en force, à apprendre, à persévérer. C’est ce qui fait d’elle une sportive exceptionnelle.
A l’image de sa saison, Carole termine 2025 avec panache : mélange de puissance, de lucidité et de cœur. Et son sac à dos, déjà bien rempli d’expériences et de médailles, s’enrichit d’une leçon de plus – celle d’une championne qui ne renonce jamais. Céline Latscha


