Actualités

Toujours prêt à partir en mission

Edition N°12 - 30 mars 2022

Jean-Philippe Mayland dans son jardin à Moutier. (photo Claudine Assad)

Le cinquième épisode de notre série consacrée à des personnalités de 65 ans et plus est dédié à Jean-Philippe Mayland, ancien inspecteur forestier.

« J’aime le travail bien fait », confie Jean-Philippe Mayland. Une prédilection qui guidera toute sa vie professionnelle et sa vie (très) active après la retraite. Ingénieur forestier diplômé de l’EPFZ, Jean-Philippe Mayland s’installe à Moutier en 1979 quand il est nommé inspecteur forestier d’arrondissement XV.

« Qu’est-ce que tu vas faire dans ce trou ?! » s’exclame son père, Genevois d’origine, haut fonctionnaire dans l’administration fédérale à Berne. Un « trou » auquel Jean-Philippe s’attachera pourtant puisqu’il y bâtira sa maison familiale, qu’il pendulera durant treize ans pour aller au travail à Lyss, après avoir changé d’emploi, et qu’il y restera à l’heure de sa retraite (anticipée) à 63 ans, en 2010.

« C’est une région magnifique et très intéressante surtout au niveau du paysage », confie-t-il.

Une enfance bernoise

Né à Berne le 2 mars 1947, Jean-Philippe parle le français à la maison, mais il suit toute sa scolarité en allemand. « Je suis parfaitement bilingue et c’est ce qui m’a été le plus utile dans ma vie. » Enfant, il passe ses vacances chez ses grands-parents à la vallée de Joux où il apprend le travail dans une ferme voisine. Il rêve de devenir ingénieur agronome, mais sa grand-mère, elle-même fille de paysan, lui conseille d’opter plutôt pour la filière forestière. C’est ainsi qu’il décroche un diplôme d’ingénieur forestier de l’EPFZ en 1971. Idéaliste, il se projette dans une carrière dans le Tiers Monde et suit une formation d’aide au développement. Une première expérience comme coopérant volontaire en Iran le fait déchanter : « J’ai compris que j’étais trop Suisse pour m’adapter dans des pays où le clientélisme et le système des prébendes sont souvent plus importants que le travail bien fait. Je risquais même de mettre en danger les collaborateurs locaux qui étaient amenés à partager mes vues. » Retour en Europe, donc, en France d’abord comme conseiller de propriétaires forestiers privés dans le Tarn. Puis à Moutier comme inspecteur forestier.

De Bellelay à la Scheulte

« Je travaillais avec une équipe d’une dizaine de personnes, des bûcherons, des gardes-forestiers. De Bellelay jusqu’à la Scheulte, chaque coupe devait obtenir l’aval du Service forestier. » Un travail sur le terrain qui le passionne durant dix-sept ans, jusqu’en 1996. Puis des réformes menacent de fonctionnariser la profession. Jean-Philippe Mayland décide de s’en aller et décroche un poste d’enseignant au Centre forestier de formation à Lyss. « Mes élèves étaient d’anciens bûcherons qui voulaient devenir gardes-forestiers. Des adultes très motivés qui payaient de leur poche l’écolage très élevé d’une école à plein temps durant deux ans. » Penduler chaque jour entre Moutier et Lyss, cela fatigue et conditionne grandement son choix d’une retraite anticipée à 63 ans. Mais ce n’était pas pour se reposer !

Responsable des travaux de rénovation du Foyer

A peine retraité, Jean-Philippe Mayland accepte de prendre la responsabilité de la direction des travaux de rénovation de la salle de paroisse, le Foyer. Il était parti pour un mandat de quelques mois. Le projet a finalement pris trois ans. « Cela a été plus difficile que je le croyais. Mais j’ai voulu rester jusqu’au bout. » Encore l’amour du travail bien fait !

Sitôt les travaux terminés à Moutier, renouant avec ses idéaux de jeunesse, le voilà parti pour une autre mission bien plus lointaine, à Bornéo, en Indonésie. Avec l’ONG allemande « Fairventure worldwide », il s’agissait de tenter de créer une alternative à la culture d’huile de palme sur les sols défrichés et dégradés notamment en plantant des arbres à croissance rapide. « On s’adressait aux petits paysans. Au début ils étaient cinquante, aujourd’hui ils sont plus de 1000. C’est une goutte d’eau par rapport aux moyens déployés par les multinationales. » Mais Jean-Philippe Mayland a appris à réduire ses ambitions. De 2014 à 2017, il fera quatre missions de 5-6 semaines. « Quand je n’ai eu plus rien à leur apporter, je me suis retiré. »

En Suisse aussi il ne quitte pas totalement le mode de la forêt. Durant une quinzaine d’années, jusqu’en 2021, il est président-animateur d’une association professionnelle (cpp-apw) qui couvre tout le pays et qui vise le partage d’expériences et la promotion de la sylviculture d’essences forestières précieuses comme le noyer ou le merisier, par exemple. Un engagement qui lui permet de prolonger son activité d’enseignant forestier et son implication avec des collègues qui partagent sa passion. « Là aussi j’ai arrêté quand je n’ai plus rien eu à apporter. »

Chant et trekking

Alors comment occupez-vous votre retraite depuis 2021 ? « Je fais beaucoup de marche et de trekking. J’ai toujours chanté dans diverses formations et je suis président du chœur de l’Eglise protestante à Moutier. J’ai aussi cinq petits-enfants… » Donc vous êtes occupé à plein temps ? « Je ne m’ennuie pas. Mais si on me proposait une autre mission, je ne dirais pas non. »

Claudine Assad

Jean-Philippe Mayland dans son jardin à Moutier. (photo Claudine Assad)