Portraits

Une force puisée dans la douleur

Edition N°7 - 19 février 2020

Mady Gagnebin: «La souffrance m’a rendue réceptive à l’amour de Dieu.» (photo ldd)

Est-il possible de vivre après l’abus et le rejet ou seulement survivre? Vous découvrirez la réponse à cette pertinente question dans le livre saisissant de Mady Gagnebin intitulé «Des épines et des fleurs». Dans ce récit qui se lit comme un roman, elle relate les souffrances et la résilience d’une vie éprouvée, mais consacrée à Dieu. Sa faiblesse est devenue sa force intérieure et les précieux conseils de cette femme indestructible, qui a suivi une formation en relation d’aide, se veulent réconfortants pour les personnes qui sont plongées dans le doute, l’incompréhension et la souffrance. 

Comment Mady Gagnebin aurait-elle pu surmonter les traumatismes de son enfance sans un caractère fort? «Je pense sincèrement que je n’aurais pas survécu», confie-t-elle en marge de la sortie de son livre de 109 pages «Des épines et des fleurs», disponibles dès maintenant dans les librairies de la région. «Ce récit est destiné à encourager ceux qui sont confrontés aux épreuves et à l’adversité. C’est un témoignage de la puissance de la vie de Dieu au sein de l’inacceptable», relève Mady Gagnebin, née en 1949 à Chexbres. 

Un livre bouleversant dès son introduction

Après avoir connu une enfance douloureuse marquée par le rejet et les abus, elle a découvert le sens de la vie en rencontrant le Seigneur Jésus-Christ à 16 ans ce qui lui a donné un objectif pour son avenir. «Il faut parfois attendre longtemps avant de voir les promesses de Dieu se réaliser; mais cette attente est bonne, car elle est formatrice, elle nous apprend la persévérance, la patience et fortifie notre foi, elle nous amène dans la sanctification sans laquelle nul ne verra Dieu», glisse notamment Mady Gagnebin dans un ouvrage bouleversant dès son introduction: «Notre première année de mariage a été difficile: une météo exécrable, et donc une mauvaise récolte de légumes. Les finances n’étaient pas très bonnes. Et toi, tu es venue trop vite, charogne de gamine!» Telles furent les paroles de son père peu avant sa mort. Il avait exercé la profession de jardinier-maraîcher sur la Riviera vaudoise. Dans son ouvrage, Mady Gagnebin révèle qu’elle a vécu l’inceste jusqu’à l’âge d’environ 4 ou 5 ans. «Ensuite, mon père qui était chrétien, s’est rendu compte qu’il faisait mal et ne m’a plus touchée, mais il ne s’est pas non plus investi dans ma vie, je pense pour se protéger, ce dont je lui sais gré. Toutefois, le mal était fait. Je n’ai connu ni reconnaissance ni affection ni encouragement; au contraire, que des exigences. Maman était très occupée avec les cinq autres enfants qui ont suivi, et je me suis vite sentie mise de côté, de trop.» En fait, Mady Gagnebin n’a jamais trouvé sa place dans la famille et cela ressort de manière criarde dans son livre qui reflète à merveille la dualité de sa vie. «On a besoin autant de la nuit que du jour pour vivre, de même, il n’y a pas de résilience sans souffrance, la haine peut se tourner contre le mal et mettre l’amour en évidence. Dieu lui-même est dual, il est un tendre Père, mais il est aussi un juge intransigeant. La nuit soutient le jour, le jugement met en évidence la grâce. Mon chemin a été hérissé d’épines blessantes, mais il a aussi été parsemé de fleurs bienfaisantes, apaisantes, revitalisantes et encourageantes». Cet extrait puisé dans son récit est en quelque sorte un condensé de l’existence de Mady Gagnebin, qui a jonglé toute sa vie entre les expériences douloureuses et les moments merveilleux. 

«Mon père ne m’a pas légué que des mauvaises choses» 

«Au moment où je termine ce livre, je me trouve dans un bonheur profond, une sérénité et une paix jamais connues auparavant. Depuis quelque temps, j’expérimente les interventions miraculeuses de Dieu qui raniment en moi une forte pulsion de vie», confie Mady Gagnebin. Engagée au sein d’une communauté de diaconesses évangéliques, elle a grandi dans sa foi au service des autres, à l’écoute de la Parole de Dieu et sa mise en pratique. Malgré sa foi, les blessures de son enfance ont toutefois refait surface au travers de fortes dépressions qui l’ont poussé à envisager le pire, actes à l’appui, pendant 13 ans. Après de bons soins qui n’ont pas abouti et sur proposition de la direction, Mady Gagnebin a quitté le diaconat, pensant qu’elle trouverait plus facilement de l’aide à l’extérieur. Elle s’est mariée, a suivi une thérapie psycho-spirituelle. Après guérison intérieure, elle s’est formée en relation d’aide fondée sur la foi et le fonctionnement psychologique de l’être humain, créé à l’image de Dieu. Mady Gagnebin prétend que la souffrance l’a rendu réceptive à l’amour de Dieu et a sanctifié son caractère fort. Un héritage de son père qui, selon ses propres termes, ne lui a pas légué que des mauvaises choses. Une phrase qui en dit long sur la grandeur d’âme de Mady Gagnebin, qui a souvent plié sans jamais rompre. 

Olivier Odiet 

«Apprécier le moment présent»

Agés de 70 ans, Mady Gagnebin et son mari Raymond jouissent d’une retraite bien méritée dans leur maison de Bévilard: «C’est une période particulière de notre vie», signale-t-elle dans son livre Des épines et des fleurs. «Déjà avant notre retraite, nous avions décidé de ne pas nous investir dans plein d’activités, comme beaucoup d’aînés qui sont plus actifs que lorsqu’ils travaillaient et se plaignent déjà d’être fatigués. Déjà, notre état de santé ne nous le permet pas non plus. Nous sommes heureux de vivre plus relax et d’avoir du temps pour apprécier le moment présent, soit en nous baladant dans la merveilleuse nature de Dieu, soit en vivant la convivialité avec d’autres frères et sœurs en Christ, soit en accordant ici ou là quelque attention envers une personne souffrante ou quelque conseil issu de notre vécu dans le désarroi d’une autre.» 

Dans la phase actuelle de sa vie, Mady Gagnebin souligne qu’elle est libérée de toutes contraintes malsaines: «Je peux vivre dans la sérénité de la présence de Dieu en cette dernière étape vie. Mon Dieu pourvoit à tous mes, nos besoins, jour après jour. Non, tout ne baigne pas dans l’huile, il y a toujours et encore des combats, des épreuves à surmonter: mais il nous soutient, nous porte et nous conduit selon ses plans d’amour. Notre vie est entre ses mains, notre avenir lui appartient. Hier n’est plus, demain ne nous appartient pas, aujourd’hui le Seigneur pourvoit.»

(oo) 

Mady Gagnebin: «La souffrance m’a rendue réceptive à l’amour de Dieu.» (photo ldd)