Portraits, Sport

« Ensemble, on va s’en sortir ! »

Edition N°40 - 28 octobre 2020

Stéphanie Mérillat: « La survie de notre club est clairement en jeu et cela nous inquiète profondément, même si on va tout mettre en œuvre pour que le HCB perdure. » (photo ldd)

Co-présidente du HC Bienne, Stéphanie Mérillat ne décolère pas. Même avec du recul, elle a toujours du mal à comprendre la décision de limiter les grandes manifestations à 1000 personnes. Malgré la gravité de la situation, elle conserve l’espoir de voir la grande famille du HCB surmonter cette crise.

– Stéphanie Mérillat, en tant que co-présidente du HC Bienne, comment vivez-vous la situation actuelle ?

– Mon humeur est en dents de scie. Il y a des moments plus positifs et des moments plus négatifs, mais il y a surtout beaucoup de frustration qui règne. Voilà 10 ans que j’œuvre dans ce club avec mes collègues du conseil d’administration, 10 ans que l’on avance pas à pas pour essayer de mener ce club vers le titre suprême et on pensait avoir réussi à atteindre un certain palier avec les deux saisons encourageantes que nous venions de vivre. Un palier qui nous donnait envie plus que jamais de continuer sur cette voie pour enfin arriver dans le top de l’élite du hockey suisse. Sincèrement, je ne pensais pas que tout allait s’écrouler aussi rapidement et qu’un virus puisse soudainement nous mettre dans une situation aussi précaire.

– Avec le recul, est-ce que vous comprenez la décision prise vendredi dernier par le conseiller d’Etat bernois Pierre Alain Schnegg de jouer trois matches de National League sans spectateurs ?

– Cette nouvelle est un choc et le durcissement des mesures est dur à encaisser…. Malgré un concept de sécurité sanitaire qui a fait ses preuves – à ma connaissance, il n’y a pas de cas qui ont émané de matches de hockey – nous allons devoir nous plier à ces nouvelles restrictions. C’est particulièrement la soudaineté de l’annonce qui nous a étonnés. Dans cette situation de crise, nous aimerions pouvoir continuer à jouer dans un environnement sûr, avec des mesures appropriées. Et pour ceci, il est essentiel pour nous d’avoir une bonne communication avec nos autorités afin que ça ne soit pas la panique qui nous dirige, mais bien des décisions concertées qui ne mettent ni la population, ni l’économie du sport professionnel en danger. A l’heure actuelle, les différences sont nombreuses entre les cantons et je pense que la Ligue va devoir réévaluer la situation très vite. Notre envie à tous est de trouver une solution équitable et identique pour tous les clubs de la Ligue.

– Suite à cette décision, quelles sont les mesures prises par le HC Bienne au niveau des abonnés et des partenaires commerciaux ?

– Pour l’instant, nous sommes contraints de réagir à la situation et nous essayons tant bien que mal de remplir les 1000 places le plus équitablement possible, en tirant au sort les spectateurs qui pourront venir. En ce qui concerne les abonnés, les partenaires commerciaux et tous les gens qui gravitent autour du HC Bienne, nous avons pris la décision d’attendre la fin de la saison pour voir exactement à quelle sauce nous serons mangés ! A la fin de la saison, nous saurons quelle prestation a pu être proposée et nous déciderons alors s’il y a lieu d’effectuer d’éventuels remboursements en fonction du nombre de matches joués.

– Economiquement parlant, la situation actuelle est-elle encore tenable ?

– Je crois qu’on l’a dit et redit … la situation était déjà très précaire avec 3777 spectateurs, alors évidemment avec 1000 spectateurs …

Si cette jauge à 1000 spectateurs doit se prolonger, nous allons terminer avec un déficit qui pourrait se monter entre 4 et 7 millions de francs suisses ! C’est une situation intenable pour le HCB et pour l’ensemble des clubs de la Ligue. La survie de notre club est clairement en jeu et cela nous inquiète profondément, même si on va tout mettre en œuvre pour que le HCB perdure. Nous voulons encore pouvoir donner à tous nos fans de l’émotion et des matches palpitants. Ensemble, on va s’en sortir !

– Sur le plan sportif, les joueurs arrivent-ils encore à rester sereins dans les conditions actuelles ?

– On remarque effectivement qu’il est difficile pour les joueurs d’avoir la tête 100 % concentrée sur le jeu et le hockey. Dans un premier, temps, il y a la situation générale : ils ont dû consentir des sacrifices concernant leur salaire et avec le nombre de spectateurs qui diminue encore, ils se demandent s’ils devront encore en faire ! Puis il y a le manque d’émotions, avec moins de monde dans les patinoires, et pas de fans adverses, l’ambiance au stade n’est pas aussi électrique que d’habitude et les joueurs ne peuvent pas puiser dans l’énergie que leur apporte les fans…. Ça se ressent dans le jeu, il y a moins d’intensité. Finalement, ils ont dû faire face au choc de la maladie de leur coach et à tous les ajustements qui ont dû être effectués en dernière minute pour pallier l’absence d’Antti. Il faut non seulement encaisser le coup, mais en plus s’adapter à un nouveau coach ! C’est clair que tous les réglages ne sont pas encore faits.

– Arrivez-vous encore à trouver des sources d’espoir dans ce contexte d’incertitude ?

– Evidemment, il faut toujours garder de la positivité et de l’espoir parce que sinon on ne serait pas en train d’exercer le métier qu’on fait ! La seule source d’espoir pour le moment, c’est de se dire que cette situation ne va pas perdurer pendant des années et que finalement on va revenir en mode normal. Je me réjouis vraiment du jour où on pourra se retrouver dans une patinoire pleine avec l’ambiance, avec les tambours, avec les cris des supporters et surtout avec des matchs qui ont l’intensité qu’ils méritent pour retrouver le vrai championnat de hockey suisse. En attendant, on doit faire au mieux pour jouer cette saison avec les contraintes qui nous sont données.

– Compte-tenu de la tempête actuelle, avez-vous déjà songé à quitter le navire HC Bienne ?

– Non, jamais ! Même si j’ai eu des petits coups de mou, il n’est pas envisageable que j’abandonne le club au moment où il a le plus besoin de tout le monde…. pas seulement des dirigeants, mais également de tous les fans, les amis, les supporters, sponsors et donateurs, ainsi que les employés et les bénévoles…. Je crois qu’on a besoin de se serrer les coudes parce que c’est ensemble qu’on surmontera cette crise. Et j’aimerais profiter de cette plateforme pour remercier l’ensemble de la famille du HC Bienne, qui travaille, qui nous supporte et qui envoie des messages de soutien. La vox populi semble claire. Elle ne veut pas la mort de son club… Cette solidarité fait chaud au cœur !

Propos recueillis par Olivier Odiet

Stéphanie Mérillat: « La survie de notre club est clairement en jeu et cela nous inquiète profondément, même si on va tout mettre en œuvre pour que le HCB perdure. » (photo ldd)