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Expansion du volume d’affaires

Edition N°36 - 6 octobre 2021

Patrick Linder : « La perturbation des collaborations industrielles entre entreprises suisses et européennes est aujourd’hui largement sous-estimée. » (photo a-oo)

L’intégralité des indicateurs du baromètre industriel de la Chambre d’économie publique du Jura bernois (CEP) révèle des anticipations favorables dans les entreprises du secteur secondaire pour le dernier trimestre 2021. Cet instrument met en lumière les grandes tendances de l’industrie dans une région parmi les plus denses de Suisse au plan de l’emploi industriel et offre des clés de lecture pour les enjeux sectoriels. Une croissance généralisée du volume d’affaires et l’intensification des investissements sont les deux traits qui particularisent une séquence positive débutée durant le premier semestre 2021.

Le baromètre industriel de la Chambre d’économie publique du Jura bernois (CEP) ausculte régulièrement les anticipations des entreprises du secteur secondaire d’une région accueillant un écosystème de production caractérisé par l’interdépendance et la complémentarité de ses acteurs. Plongeant au cœur des entreprises, cet outil prospectif de compréhension permet la mise en exergue de grandes tendances de l’industrie.

L’ensemble des paramètres analysés indique la poursuite d’une séquence propice dont l’ouverture, douce et progressive, remonte au premier semestre 2021 après plus d’une année de point d’orgue industriel imposé par la pandémie de COVID-19. Concernant petites et grandes entreprises, les tendances sont univoques, notablement homogènes et dénotent une confiance d’ensemble dans le secteur secondaire en dépit d’éléments externes perturbant déjà la reprise (allongement des délais d’approvisionnement, hausse des prix des matières premières et des composants) et affaiblissant des marges pourtant nécessaires.

Le volume d’affaires poursuit son expansion pour la grande majorité des entreprises et effleure le niveau anté-COVID-19. Les prévisions en termes de carnets de commandes sont optimistes et semblent aptes à garantir une fin d’année 2021 satisfaisante du point de vue d’ensemble de l’utilisation de l’outil de production. La question de la distinction des effets de rattrapage de ceux, complexes, d’essence conjoncturelle ne peut cependant être abordée dans cette phase.

Nette amélioration des intentions en matière d’investissements

En termes de résultats opérationnels, des améliorations sont attendues par la plupart des entreprises pour le quatrième trimestre, malgré la hausse des prix et les craintes d’inflation. Au sortir d’une période délicate, la capacité à générer des profits s’impose comme un aspect déterminant fortement la continuité – voire la pérennité – des activités, notamment pour le remboursement des prêts contractés durant la pandémie, mais surtout pour assumer l’investissement, différé mais requis pour le maintien de la compétitivité et l’avancée sur le chemin de la digitalisation. Grandes et petites entités anticipent des résultats financiers satisfaisants pour la fin de l’année 2021.

Le paramètre de l’investissement est central dans le cadre d’un système de production constitué de PME interdépendantes collaborant entre elles, comme c’est le cas dans le Jura bernois et plus largement dans l’Arc jurassien. Il détermine grandement les capacités d’innovation et conditionne la compétitivité dans le long terme. Une amélioration nette des intentions en matière d’investissements émerge dans l’ensemble de l’industrie régionale. Elle compense probablement une retenue prudente liée à la propagation mondiale de la pandémie depuis mars 2020 alors qu’une séquence peu propice avait déjà débuté depuis le milieu de l’année 2019. Ce signal positif renforce la confiance traversant actuellement l’industrie régionale et contribue à la propagation des dynamiques industrielles jusqu’aux petites PME hautement spécialisées et souvent actives dans des niches.

Finalement, une grande majorité des acteurs de l’industrie régionale projette un déploiement pour 2022. Cette prévision – susceptible d’être révisée en fonction des développements à court terme de l’économie sur des bases factuelles ou événementielles – traduit l’assurance dont fait preuve l’industrie régionale.

Rompue aux moments difficiles, réactive, résiliente, elle a pu traverser la pandémie en adaptant rapidement son organisation et en recourant avec expérience aux outils mis à disposition. A la lueur des projections désormais effectuées, le niveau de déploiement de l’outil de production régional devrait augmenter, engendrant une forte augmentation des besoins en termes de compétences et de spécialistes.

Brumes européennes

Les entreprises ont été interrogées sur les entraves mises à cette phase positive. Si la hausse des prix, l’allongement des délais dans certaines chaines d’approvisionnement et la pénurie de professionnels empêchent de capitaliser pleinement sur cette séquence, la décision politique du Conseil fédéral menant à la rupture des relations formelles avec l’Union européenne (UE) engendre un grand questionnement et de nombreuses incertitudes chez les acteurs industriels. L’impact immédiat sur les entreprises actives dans les medtech a jeté une lumière crue sur les effets concrets craints pas l’industrie. Ce sujet a fait l’objet d’un examen approfondi auprès des entreprises dans le Jura bernois. D’une manière générale, les PME appréhendent une aggravation des complications pour l’exportation vers l’UE, premier partenaire économique de l’industrie régionale, sans être en mesure de les identifier précisément. En conséquence, elles peinent à décrire les compétences, prestation de services ou conseils dont elles auront besoin pour maintenir leurs activités européennes.

L’absence d’informations précises, de considération formelle de la problématique ou encore d’actions diplomatiques visant par anticipation à atténuer les effets est fustigé. « Le Conseil fédéral doit assumer sa décision, se montrer conséquent et déployer les actions requises pour protéger le tissu industriel suisse des PME d’un choc externe qui pourrait le déstabiliser en profondeur, en raison de la place qu’occupe pour lui le marché européen, mais aussi en regard de l’imbrication profonde des interactions. La perturbation des collaborations industrielles entre entreprises suisses et européennes est aujourd’hui largement sous-estimée », insiste Patrick Linder.

(cp)

Patrick Linder : « La perturbation des collaborations industrielles entre entreprises suisses et européennes est aujourd’hui largement sous-estimée. » (photo a-oo)