A peine sorti, le dernier film de Lucienne Lanaz récolte des commentaires et critiques dithyrambiques. Dans son nouveau documentaire, Gianerica, elle met en évidence la vie de deux artistes domiciliés à La Neuveville, âgés de 95 et 91 ans. Au travers d’une mise en scène sobre, sensible et efficace, elle réussit, comme à son habitude, à sublimer ce couple attachant et à en tirer le meilleur avec une délicatesse toute naturelle. A voir en avant-première dans la région, après les journées de Soleure, en présence de la réalisatrice.
Le film accompagne et suit le couple d’artistes Gian et Erica Pedretti, durant la préparation d’une exposition qui permettra de partager leur monde au travers de leurs œuvres artistiques et littéraires. Leur quotidien ou leur passé, enrichi d’archives et de témoignages d’amis feront découvrir au spectateur l’essentiel de leur vie.
Synopsis
La poésie, dit l’artiste Gian Pedretti, est un moyen de contrer le malheur et l’injustice.
Depuis leur jeunesse, Gian et sa femme, l’écrivain et artiste reconnue Erica Pedretti, qui ont maintenant atteint l’âge de la sagesse, ont dédié leur vie artistique dans ce sens. Comment ont-ils pu maintenir l’équilibre entre la vie et l’art, en élevant ensemble cinq enfants et en vivant parfois dans la pauvreté ? Le film sur Erica et Gian Pedretti se fonde sur la sensualité des travaux qu’ils préparent pour leur probablement dernière exposition commune. Les images cinématographiques actuelles et les flash-backs permettent une vision de ce couple d’artistes âgés, de leur attachement inhabituel et qui ne sont plus très à l’aise avec la parole. Tous deux sont plutôt réticents en explications les concernant et en descriptions de leur art. Il reste donc les observations cinématographiques des personnes et de leurs œuvres, afin que les spectateurs puissent voir la poésie et la beauté de ce mode de travail et de vie particulier.
Gian Pedretti
Né en 1926 à Bâle, il suit l’Ecole des arts et métiers de Zurich. Lors d’un séjour à Paris, il fait la connaissance d’Alberto Giacometti. Il travaille principalement comme plasticien ou peintre réalisant des portraits, des natures mortes au travers de diverses techniques. Il publie également des textes en prose. Ce peintre et sculpteur évoque son art en toute simplicité, démarche qu’il associe à de l’artisanat. Reconnu dans toute la Suisse, il est honoré de nombreux prix, dont le prix culturel de Bienne, en 2011. Gian Pedretti ne se sent pas très à l’aise pour parler de son art, « parce que ce travail, je le fais pour moi. Que d’autres personnes soient touchées par ce que je fais est une confirmation que je ne suis pas totalement à côté de la plaque dans mes tentatives de compréhension du monde », philosophe-t-il. Et il rajoute : « L’art est une surprise. Je ne dis jamais que c’est moi qui ai fait un tableau, mais que c’est arrivé ».
Erica Pedretti
Née en 1930 en République tchèque, elle fréquente le gymnase de Stenberk. Elle arrive en Suisse en 1945 grâce à la Croix-Rouge, comme réfugiée. Elle a appris l’orfèvrerie sur argent à l’Ecole des arts et métiers de Zurich et a exercé cette profession à New York de 1950 à 1952. De retour en Suisse, elle fait la connaissance de son époux, Gian, et s’installe d’abord avec lui à Celerina (Engadine), puis à la Neuveville. Romancière et plasticienne, elle décroche en 2013 un des premiers prix suisses de littérature pour récompenser l’ensemble de ses œuvres. Son action est marquée par les contrastes entre ses sombres souvenirs d’enfance et une existence apparemment sereine en Suisse. Son style, incertain et tâtonnant, est caractérisé par la difficulté qu’elle éprouve à formuler des souvenirs douloureux. Sculptrice, auteur de romans et de nouvelles, Erica Pedretti écrit aussi des pièces radiophoniques et dramatiques.
En première régionale
Dans ce voyage cinématographique, tourné dans des décors naturels et paisibles, Gian et Erica partagent leur monde avec leurs pensées, leur créativité, leur passé ou leur quotidien. Avec leur sagesse, ils ouvrent les yeux du spectateur sur la beauté et l’amour des gens comme eux les vivent. C’est leur héritage pour la postérité. Lucienne Lanaz, la cinéaste de Grandval, a su capter ces moments avec sensibilité, humanité, et en tirer le meilleur avec des prises de vue douces et un montage parfait. Le film de 55 minutes est en allemand et sous-titré.
Claude Gigandet
Cinéma La Grange, Delémont, jeudi 10 juin (18 h), dimanche 13 juin (17 h).
Cinoche Moutier : samedi 12 juin (17 h 30, suivi d’un apéro).