Combinaison de protection, gants, masque et coiffe, c’est ainsi que se sont présentés les auteurs du journal satirique prévôtois en conférence de presse. Ils ont mis en garde: entièrement imprimé à l’encre de chine avec du papier chinois recyclé, il est préférable de le lire avec des gants, quoiqu’une semaine après sa sortie, lorsque paraîtra cet article, le gros risque de contamination aura peut-être disparu, le virus ne supportant pas la rigolade. Par contre, la fièvre carnavalesque, elle, risque encore de provoquer quelques spasmes de bonne humeur, de fous rires ou faire grincer quelques dents à celles et ceux qui y sont épinglés.
Attendu avec une franche convoitise par certains et la crainte de rire jaune par d’autres, le Schnapou, 43e édition, est sorti de presse et réserve son lot habituel de surprises. Le pamphlet satirique s’en donne à cœur joie avec l’actualité de l’année écoulée riche en rebondissements politiques de tous genres. S’il est parfois piquant ou un peu acide pour certains, (surtout pour les milieux probernois) il ne sombre pas dans la vulgarité ou la méchanceté. Ses rédacteurs et informateurs traquent les petits travers, gaffes et bévues des gens de la région et les rapportent avec humour et dérision.
Miss et rubriques
Le Schnapou, c’est encore et toujours une miss légèrement vêtue en première page. Miss Quendressa 1re, allias Quendy, a été plébiscitée aussi bien par la gent féminine que masculine, les jeunes ou les vieux kroumirs. Elle est gérante de la dernière des banques (BCJ) arrivées sur la place financière importante qu’est Moutier et elle pose tout sourire. Elle cultive sa photogénie grâce à une frange toujours impeccable, des tailleurs au top et des chaussures dernière mode. Pour qui la suit sur les réseaux sociaux où on la retrouve presque toujours bondissante, sautillante, trépidante et débordante de vie, ce qui la projette sur toutes les pages du journal satirique, les bras levés vers le ciel comme pour implorer les dieux de Wall street de la soutenir dans sa quête professionnelle.
Un autre tient aussi une bonne place dans l’opercule, c’est le chat Polka, qui journellement s’invite dans tous les coins et recoins du quartier de la gare, s’invitant même sur tables et bureaux. Pas gêné, lui! Et comme d’habitude, le journal est soutenu par plus de 130 annonceurs, un peu masos, qui payent pour voir leur nom ou leur raison sociale égratignés. Ce doit être le seul journal où on lit toutes les pubs!
On ne sera pas étonné non plus de découvrir sous la rubrique «T’as de Moutier si …» des personnes qui se sont un peu laissées aller ou n’ont pas réussi à effacer des bêtises qu’ils confessent à tout va. De même pour la rubrique immobilière où l’on tente de vendre ou louer du vieux au prix du neuf ainsi que les frasques d’un concierge connu comme le loup blanc. On ne vous dira pas de qui il s’agit, mais essayez de le trouver avec les indices suivants: ça commence par Ki et ça finit par Ki!
On n’oublie pas la politique
On pourra s’amuser avec la double page de jeux de la partie centrale ou encore essayer de résoudre une énigme avec une pièce jouée en fin d’année dernière en cherchant à savoir qui a tué Marcel, sachant que huit femmes participaient à l’intrigue. On découvre encore la préfète avec des amis dont on ne soupçonnait même pas qu’elle les connaissait, ce qui fera dire à quelques esprits chagrins que certaines de ses décisions seraient tout à fait fortuites. On pourra aussi lire un fac-similé d’un moutzi résistant et persistant.
Bien entendu, des centaines de Prévôtois ont commis l’imprudence de laisser filtrer leurs gaffes, bévues et sornettes qu’ont relayé la trentaine de collaborateurs, dont la moitié de jeunes, qui ont des antennes partout et ne se gênent pas de rêtcher, délatter, dénoncer ou cafter. Le Schnapou a des oreilles partout.
La censure sévit
Les responsables ont constaté avec consternation que la censure sévit et touche tous les médias satiriques. C’est face aux menaces de plaintes de tous poils que ces chenapans du Schnapou ont été contraints de filtrer l’information, d’édulcorer les propos, d’adoucir le vocabulaire et même de truquer des photos! Ils viennent de s’adjoindre un service juridique performant payé par des banques et mécènes fortunés. Toutefois, les histoires scabreuses et non expurgées peuvent être obtenues à titre privé, moyennant finances bien entendu, contre une demande écrite et motivée à la case postale du journal.
Et les rédacteurs adressent encore ce message aux plus jeunes: «Le Schnapou n’aient pa difuser sur lés reso socios. Y fôt lacheté» (et le lire pour ceux qui savent encore, plaisantent-ils)!
Claude Gigandet