Le bas régime de fonctionnement actuel engendre inéluctablement des performances financières médiocres, annihile les capacités d’investissement et affecte dans certains cas l’emploi. «La tonalité classiquement horlogère de la séquence en cours tempère quelque peu les projections pessimistes de l’industrie de la précision dans la mesure où le caractère cyclique des besoins a déjà été expérimenté dans l’histoire économique régionale», remarque Patrick Linder, directeur de la CEP. «La durée de cette phase promet cependant d’être le paramètre critique pour l’ensemble du tissu industriel».
Le baromètre industriel de la Chambre d’économie publique Grand Chasseral (CEP) met en lumière les grandes tendances de l’industrie de la précision en pratiquant tous les trimestres une analyse prospective. Occupant environ un emploi sur deux dans la région du Grand Chasseral (Jura bernois), le secteur secondaire y est aussi homogène, complémentaire qu’interdépendant. Le baromètre industriel propose trimestriellement une synthèse des tenants et aboutissants de l’industrie régionale avec une attention particulière portée au système de production microtechnique.
Chute radicale de l’intensité
Les indicateurs relatifs aux entrées de commandes révèlent des projections négatives uniformes parmi les entreprises industrielles avec quelques exceptions notamment dans le domaine d’application du medtech, apparemment préservé. Pour certains acteurs, le volume d’affaires devrait se stabiliser durant le premier trimestre 2025 à un niveau relativement bas toutefois; pour d’autres entreprises, il devrait poursuivre la contraction initiée dans le courant 2024.
L’activité industrielle a connu une très forte réduction qui promet donc de s’intensifier encore. «Il est prématuré de déclarer que le creux de la vague est atteint, mais il est indéniable que l’intensité a radicalement chuté en moins de douze mois et qu’elle est en principe appelée à redémarrer d’ici le début 2026. Domaine d’application historique des capacités de production de l’écosystème industriel régional, l’horlogerie joue le rôle principal dans cette phase délicate et sa demande affaiblie ne suffit manifestement plus à engendrer un halo de préservation des capacités industrielles suisses», constate Patrick Linder. Corrélés à des entrées de commandes fixées à un niveau faible, les résultats financiers attendus pour les prochains mois sont en détérioration dans la plupart des cas. Pour autant, certains acteurs entrevoient une stabilisation sans que les résultats opérationnels prévus ne puissent s’avérer satisfaisants.
Sur le plan financier, la temporalité de la séquence actuelle déterminera largement la nature des dommages occasionnés, notamment aux trésoreries.
L’investissement est un indicateur essentiel
Progressivement revues à la baisse durant 2024, les capacités d’investissements semblent dans l’ensemble être maintenues pour le début de l’année, même si elles ne paraissent pas en mesure de garantir la compétitivité du tissu industriel en cas de prolongation de la configuration en vigueur. Plus préoccupant, certains acteurs industriels ont été contraints à revoir fondamentalement leurs prévisions en termes d’investissement. Enfin, certaines entreprises parviennent à maintenir le cap et à assurer l’engagement de ressources requis pour demeurer innovantes.
Dans le baromètre industriel de la CEP, l’investissement est un indicateur essentiel dans la mesure où il permet d’apprécier la propagation de la demande au sein de l’écosystème de production composé de PME interdépendantes et complémentaires localisée dans l’Arc jurassien. D’autre part, il fournit un regard sur les dispositions fondamentales d’innovation des entreprises, directement déterminées par les moyens mis à disposition, et, avec elles, sur le maintien de la compétitivité de l’industrie.
Dans le moyen terme, une dégradation est décelée dans la projection que font les entreprises. Si la plupart des acteurs industriels estime disposer d’un niveau d’organisation adapté, quelques entreprises envisagent une réduction dans les douze mois. Cette vision promet un impact, encore modéré, sur l’emploi. « Cette perception contraste fortement avec celle des dernières années, unilatéralement conditionnée par des visions de croissance et de développement », précise la CEP. Il convient de préciser que certaines entreprises prévoient de se développer au cours de la prochaine année. (cp-oo)