Actualités, Culture

Un dernier tour de piste

Edition N°27 – 12 juillet 2023

Même avec son fouet, Indiana Jones n’est plus vraiment l’aventurier dont on se souvient. (photo ldd)

Petits et grands connaissent forcément Indiana Jones. Coiffé de son fédora et armé de son fouet, l’archéologue traverse les époques en échappant à d’ignobles crapules et de terribles pièges antiques. En quatre grandes aventures allant de 1935 à 1957, le professeur Jones a parcouru le monde entier en quête d’artefacts aux pouvoirs mystiques et souvent dangereux. Mais tout cela semble appartenir au passé dans cette cinquième aventure. On y retrouve un Indy bien fatigué, à l’aube de la retraite. En 1969, le vieil homme vit encore dans le passé alors que les USA viennent de réussir l’impensable : marcher sur la lune. Mais le professeur n’a pas vraiment le temps de se morfondre. Sa filleule Helena fait irruption dans sa vie en voulant le convaincre de retrouver le cadran d’Archimède. Un curieux mécanisme datant de l’Antiquité pouvant supposément détecter des failles temporelles. Des âneries pour le professeur Jones, mais pas pour Jürgen Voller, un ancien nazi travaillant pour la NASA. Ce dernier a bien l’intention de trouver le cadran pour réparer les erreurs d’Hitler. De quoi donner un dernier coup de fouet à Indiana Jones pour se remettre en selle et faire face à sa destinée. 

Papy Jones… 

Une énième histoire d’aventurier au cinéma est souvent synonyme d’un certain vent frais et nostalgique, surtout durant un été caniculaire (voir encadré). Pourtant, était-il vraiment nécessaire de faire revenir Indiana Jones ? Alors que le quatrième volet offrait déjà une fin satisfaisante, cet ultime opus redistribue les cartes et veut renchérir sur le dénouement. On parlera de la conclusion un peu plus tard car ce qui fait d’abord vraiment mal, c’est de voir l’état d’Indiana Jones : ça ne va pas du tout. Le héros n’est devenu que l’ombre de lui-même, autant dans l’histoire que dans la réalité, le film ne parvenant pas à cacher les 80 ans d’Harrison Ford. Même si l’acteur se donne à fond comme à chaque fois, son costume ne lui sied plus du tout et le ridiculise carrément dans la plupart des scènes. Les cascades ne sont plus non plus ce qu’elles étaient, limitant les péripéties dangereuses au minimum. Un gros souci que le film tente vainement de contrebalancer avec des doublures ou en situant le prologue en 1944, époque durant laquelle Indy pétait la forme et les mâchoires de nazis. Pas sûr que le récit en soit aidé, d’autant plus que le professeur Jones est handicapé par sa comparse Helena qui se révèle être un personnage affreusement détestable du début à la fin. Heureusement que Mads Mikkelsen vient redresser la barre en incarnant avec brio un bien vilain comploteur germanique. 

…et le cadran de la futilité 

Là où le film se révèle plus agréable relève de la réalisation. Ayant la lourde tâche de succéder à Steven Spielberg qui avait réalisé les quatre précédents volets, James Mangold s’empare efficacement du mythe d’Indiana Jones. Visuellement, c’est très ressemblant à ce qui a été fait auparavant dans la saga. La photographie est soignée et les quelques morceaux de bravoure échappent de justesse aux effets spéciaux gangrénant moult films d’actions actuels. L’humour est aussi de la partie, bien disséminé dans quelques dialogues piquants, fleurant bon les années 1980-1990. Il y a ici un amour indéniable pour le cinéma d’aventure d’antan et l’art du poussiéreux. Dommage que le scénario ne suive pas. Parce que même si le mystère du cadran d’Archimède est assez intriguant pour garder les spectateurs en haleine jusqu’au troisième acte, le reste n’est guère engageant. Passant par quelques décors ennuyeux, la quête d’Indiana Jones semble ici trop facile. Il n’y a pas de vrais enjeux, car il n’y a pas non plus de vraies motivations pour les protagonistes. Le climax a beau remettre l’intérêt sur la table en proposant un contexte particulièrement saugrenu, le mal est déjà fait. Et quant à la fameuse conclusion, elle n’apporte rien de plus que les précédentes aventures, si ce n’est une note plus touchante et nostalgique. 

Pas de quoi arracher une pleine satisfaction. C’est donc à se demander (à nouveau) pourquoi « Indiana Jones et le Cadran de la destinée » existe. Pour capitaliser sur une poignée de fans rêvant d’entendre une dernière fois le fouet claquer ? Ça laisserait à craindre que le film soit ironiquement à la recherche du mauvais filon. Ce qui est sûr, c’est que certaines choses auraient peut-être mieux fait de rester au musée. 

Louis Bögli

« Indiana Jones et le Cadran de la destinée »
Réalisation : James Mangold
Durée : 2 h 34
Pays : USA
Note : 2.5 / 5  

 

La saison des blockbusters

Le saviez-vous ?

Cet énième Indiana Jones est un « blockbuster », terme définissant un film ayant nécessité une production colossale, autant sur le plan humain que financier. Depuis l’immense succès en 1975 de « Les Dents de la mer » du précité Steven Spielberg, les blockbusters sont pour la plupart diffusés durant la période estivale. Mais pourquoi procéder ainsi durant la période où les gens restent le plus souvent dehors ? On raconte justement que les salles américaines, bien climatisées, attiraient les spectateurs cherchant à un trouver un peu de fraîcheur en période caniculaire. Malin ! (lb)

Même avec son fouet, Indiana Jones n’est plus vraiment l’aventurier dont on se souvient. (photo ldd)