Portraits

Un véritable modèle d’intégration

Edition N°7 - 20 février 2019

Arrivés d’Espagne en 1962, Manuel et Mariana Sanchez coulent une paisible retraite dans le quartier de la gare à Moutier. (photo oo)

Arrivé à Moutier en provenance de Séville en 1962, Manuel Sanchez passe aujourd’hui une paisible retraite en Prévôté aux côtés de son épouse Mariana. Très bien entouré par leurs enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, le couple retrace les principales étapes d’une vie très riche autant au niveau professionnel que sur un plan associatif. Un modèle d’intégration qui force l’admiration. 

Entre le climat torride de l’Espagne et les hivers prévôtois rigoureux, le contraste est saisissant. Paradoxalement, Manuel et Mariana Sanchez n’ont jamais vraiment eu le mal du pays, la Suisse étant une terre d’accueil propice à l’épanouissement d’une famille, d’où qu’elle vienne. Né en 1934, Manuel Sanchez a quitté Séville pour rejoindre la Suisse en train en 1962. «Je me souviens encore du contrôle des douaniers à la frontière ainsi que du contrôle médical passé à Genève », signale Manuel. Son employeur lui avait donné une permission de six mois pour exercer sa profession de mécanicien-fraiseur chez Perrin Machines à Moutier qui manquait de main d’œuvre. «Je ne suis jamais retourné travailler en Espagne, mais mon employeur de l’époque m’avait quand même fait un cadeau de 3000 pesetas pour mon mariage », explique-t-il. Son épouse Mariana a rejoint la Suisse six mois après son mari. 

Militaire et fier de l’être… 

Trois enfants sont nés de cette union, soit Marie-José, Manuel et Marie-Angeles. Manuel Sanchez garde aujourd’hui encore un souvenir lumineux de l’époque où il travaillait pour l’armée espagnole au bureau météo de l’aviation. «J’étais habillé en civil au travail, mais je mettais l’uniforme pour aller chercher mon salaire », confie-t-il. Séville, c’est toute sa jeunesse. «A l’époque, nous circulions en vélo. Il n’y avait pas de voitures », relève-t-il. L’Espagne était encore sous le régime dictatorial de Franco. Son apprentissage de mécanicien-fraiseur, Manuel l’a effectué dans une fabrique militaire de 1948 à 1952. Son père a également fait carrière dans l’armée espagnole. Il a bénéficié d’une retraite à l’âge de 50 ans déjà ce qui ne l’a pas empêché de travailler pour la compagnie d’assurances Winterthour. «En 1964, il m’a rendu visite par surprise à mon domicile en Suisse. Je ne sais toujours pas qui lui a donné l’adresse », signale Manuel.

Une famille très unie         

Longtemps domiciliés au chemin des Bosquets à Moutier, Mariana et Manuel coulent aujourd’hui une retraite paisible dans le quartier de la gare. «Economiquement, il serait plus intéressant pour nous de retourner habiter en Espagne, mais toute notre famille est ici et c’est cette présence-là qui dicte notre choix de rester en Suisse », poursuit Manuel. Après avoir travaillé durant 33 ans chez Perrin Machines en tant que responsable de machines,  il fut victime d’un infarctus en 1995, deux jours après avoir appris la faillite de l’entreprise. Manuel Sanchez a suivi des cours au CIP à Tramelan durant une courte période de chômage. Ensuite, il a retrouvé de l’embauche dans une petite entreprise de la place qui a également cessé ses activités huit ans plus tard. Sur un plan associatif, Manuel Sanchez s’est toujours montré très actif. Membre fondateur du Centre espagnol à Moutier en 1965, il en a assumé la présidence de 1998 à 2000. Chaque semaine, il se rendait à l’hôpital pour visiter les résidents espagnols : «La direction me donnait une liste et sur cette base, j’apportais des cadeaux, soit une bouteille de vin pour les hommes et des fleurs pour les dames. » 

Supporter du FC Séville

Depuis plusieurs années, Manuel Sanchez officie en tant que représentant de la communauté espagnole à l’Eglise catholique et œuvre notamment au service d’accueil aujourd’hui encore. Il se souvient également de l’époque où il disputait des tournois de foot corporatifs regroupant les usines de Moutier. Ce grand fan du FC Séville s’intéresse à tous les championnats internationaux avec une somme de connaissances qui le rend intraitable en la matière. Couturière de formation, son épouse Mariana a également travaillé au Foyer Tornos de Moutier en tant que cuisinière. On ne peut raisonnablement pas présenter la famille Sanchez sans évoquer les milliers de kilomètres avalés durant les vacances pour rejoindre le sud de l’Espagne, la France ou l’Allemagne pour passer des moments inoubliables dans leur caravane. Aujourd’hui, entourés de leurs trois enfants, huit petits-enfants et deux arrière-petits-enfants, Manuel et Mariana n’éprouvent aucune nostalgie lorsqu’ils évoquent le passé, mais l’Espagne et Séville gardent une place importante dans leur cœur. Au même titre que leur pays d’adoption, d’ailleurs… 

Olivier Odiet 

Arrivés d’Espagne en 1962, Manuel et Mariana Sanchez coulent une paisible retraite dans le quartier de la gare à Moutier. (photo oo)