Une vigne à Grandval, de surcroît dans la plus pure biodiversité, c’est le projet visionnaire d’Aurèle Morf. L’encaveur de Moutier veut rendre les cépages encore plus respectueux de l’environnement, plus proches de la faune et de… l’esprit divin. Une sage ambition.
Mhhh… A l’odeur mi-fleur, mi-figue, mi-raisin, le vin d’Aurèle Morf ne provoque pas la fougue ni la foudre. Il se délecte avec passion et sérénité, sans s’enivrer. Un terroir tellement bien ancré dans la région qu’il évoque le lointain passé. « A l’époque sacerdotale de Moutier-Grandval, au 7e siècle, les monastères étaient empreints du monde agricole et viticole pour honorer le Très-Haut. Entre musique et art, tout rayonnait en ce sens », raconte Aurèle Morf.
Vigneron dans ses tripes et son âme, l’encaveur de la rue Saint-Germain de la Prévôté – qui ne se prédestinait pas à cette profession – veut davantage ancrer son savoir-faire dans la biodiversité. Le vigneron de Moutier, bien connu dans la région et loin à la ronde pour ses vins non filtrés, non collés et sans sulfites, a un projet novateur.
1’800 pieds sur 4’000 m2
Aurèle Morf veut implanter quelque 4’000 m2 de vignes pour 1’800 pieds sur un terrain de 6’000 m2 sur la parcelle 1016 au nord du village de Grandval, côté Raimeux. Là, il y cultivera trois cépages : Seyval blanc, Divona et Muscaris. Sur cette surface seront notamment aménagés un étang pour crapauds accoucheurs, des arbres fruitiers et deux murs de pierres sèches.
Le terrain est d’ailleurs déjà bordé d’une large haie vivrière. La parcelle en question appartient à Maurice Wisard qui l’a héritée de sa mère autrefois paysanne et qui habitait juste à côté dans une ferme, aujourd’hui disparue et remplacée par une maison d’habitation.
« C’est une opportunité intéressante de pouvoir céder cette parcelle à ce projet. Je n’ai pas d’autre terrain et cela m’arrange de savoir qu’il est à disposition d’un vigneron tel Aurèle Morf. Plus tard, je vais entamer les démarches pour léguer cette surface », relève le propriétaire de Monible.
Avec le soutien de Sébastien Gerber, écologue
Ecologue, Sébastien Gerber apporte son soutien et ses connaissances à ce projet. « La première réalisation concerne le creusage d’une marre qui s’inscrit dans un cadre à plus large échelle de la vallée du Grand-Val pour la protection d’une espèce, le crapaud accoucheur. Cela permettra à ces populations de bouger, de migrer en connexion avec les autres populations connues à Moutier », souligne l’ingénieur spécialisé. Et pour que les moutons puissent paître sans dévorer les fruits, les pieds de vigne seront surélevés.
Soutenu par Pro Natura, la revue La Salamandre, le Service de la promotion de la nature du canton de Berne et l’entreprise prévôtoise de construction et génie civil F. Hänzi SA, le projet prévoit le creusage de l’étang cet automne. Les pieds seront implantés le printemps prochain et une première vendange aura lieu d’ici cinq ans. Mis à l’enquête, le projet doit encore avoir l’aval des autorités. Alors jusque-là, santé !
Roland J. Keller