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Vers un nivellement par le bas ?

Edition N°37 - 13 octobre 2021

Il y a dix ans déjà, François Hollande avait prévu la suppression des devoirs à domicile afin « de garantir une égalité des chances aux élèves provenant de familles moins aisées ». L’ancien président français n’a jamais manqué d’idées mais leur réalisation a été, maintes fois, à l’image de son piteux mandat présidentiel. Sans vouloir en faire tout un fromage, cette idée avait aussi infusé au pays du Gruyère et un écho s’était fait entendre chez les enseignants plaidant que « 30 à 40 % des enfants ne sont pas assez aidés à la maison ». En une décennie, il faut admettre que le mot « suppression » est à la mode ! J’y reviendrai ultérieurement. En une génération, la société dans ses structures a beaucoup changé et dans des cercles très différents tels que la famille, l‘école, la vie professionnelle et les institutions étatiques.

A tous ces différents niveaux, une notion cardinale n’a plus cours auprès de la génération des 25-30 ans : l’autorité. L‘émergence de l’informatique, d’internet, des supports multimédias, des réseaux sociaux grâce à l’omniprésence du portable a bouleversé fondamentalement la façon de communiquer. Avant, la transmission du savoir était verticale, de l’enseignant à l’élève. Dans le modèle façonné par les nouvelles technologies, la transmission est horizontale et chacun et chacune est prié de trier le bon grain de l’ivraie ! Or, la génération des moins de 30 ans sera celle des parents de demain et on ne peut douter un instant qu’ils ne feront pas tout pour l’éducation et l’instruction de leurs enfants. Mais la fracture entre les anciens qui cherchent à faire perdurer le modèle qu’ils ont appris et cette nouvelle génération est radicale, brutale et sans égard avec la notion temporelle. Le temps de la réflexion, de la concertation me semble essentiel plutôt qu’une course absurde et débridée au progrès, mot fourre-tout qui arrange les consciences.

Ne pas céder aux caprices de certains   

Sur le plan sociologique, la composition de notre société a passablement évolué. Il y a vingt ans, une de mes cousines, institutrice d’école enfantine, disait avoir pas moins de douze nationalités dans sa classe. Bien sûr, la Genève internationale n’est pas le Jura bernois ! On doit cependant constater que partout en Suisse la part des élèves venant des antipodes, poussés par les conflits de tous genres avec leurs familles est en constante croissance. Pour la plupart issus de milieux modestes, ils sont sans racine culturelle avec leur pays d’accueil et ne possèdent pas les connaissances de base de l’une de nos langues nationales. Ce brassage est aussi une des composantes à l’origine de l’émergence de davantage de familles monoparentales, induisant à terme plus de pauvreté.

Devant ce constat accablant et inexorable, faut-il pour autant baisser les bras ? C’est clair que non et la suppression des devoirs à la maison est encore une illustration de la volonté de certains capricieux d’opposer les diverses classes sociales de notre pays par le biais de cette suppression des devoirs, mais aussi l’adoption de l’orthographe rectifiée et du langage épicène. Cette politisation à outrance, sous le prétexte de simplifier, d’adapter, de moderniser, aura à long terme des effets dévastateurs. Il convient donc de prendre des mesures pour élever le niveau d’instruction des élèves par des moyens appropriés plutôt que de céder à un nivellement par le bas. Le bon élève aura toujours des parents prêts à l’aider et quel que soit le statut social de la famille.

La méritocratie est l’essence même de l’égalité des chances pour tous.

Pierre Chevrier