Mais que se passe-t-il donc à Grandval devant le magasin Au p’tit lait? Une animation fébrile y règne avec des véhicules, caméras, régie son et plein de gens qui grouillent dans tous les sens, en parlant le suisse-allemand. Même la route a été fermée quelques instants au trafic. Ah, on y tourne un film, avec tous les moyens techniques modernes qui font ressembler les alentours du petit magasin à un plateau de tournage digne d’une réalisation hollywoodienne. Le producteur exécutif, Beni Lehmann, accroché à son téléphone qui sonne toutes les 30 secondes, nous reçoit avec une grande gentillesse et nous explique sa démarche: on tourne un film long métrage pour le cinéma et la télé, en allemand: Von Fischen und Menschen (des poissons et des hommes).
Le tournage de ce film qui a commencé début août durera sept semaines et se déroule dans les régions de Delémont, Moutier et Bienne. Des scènes ont été tournées dernièrement à la Foire de Chaindon et d’autres le seront dans d’autres villages. Mais la moitié des séquences sont et seront tournées à Elay (Seehof), à la pisciculture, décor principal de la réalisation. L’histoire a été écrite par Stefanie Klemm qui en assure aussi la production. 12 acteurs principaux, dont Sarah Spale et Matthias Britschgi dans les rôles principaux, plus de 100 figurants régionaux de tous âges, recrutés par appel et une quarantaine de personnes gravitent autour de ce tournage que le fond de la culture bernois a financé à hauteur de Fr. 500’000.-, représentant environ le tiers du budget.
Une tragédie
Laissons Beni Lehman, producteur exécutif et coordinateur en communication nous raconter le synopsis: «Judith est une femme forte, mère célibataire de Milla, une fillette de 6 ans. Elle gère une petite ferme piscicole dans un coin reculé et idyllique du Jura. Entre Judith et Gabriel, son nouvel employé et ancien toxicomane, se construit une relation de confiance qui dépasse progressivement les liens purement professionnels. Même la petite Milla est sous le charme de Gabriel. Mais ce bonheur ne dure pas longtemps. A la suite d’une agression dans une station-service, la petite fille, grièvement blessée, succombe à ses blessures. L’immense tristesse de Judith n’a d’équivalent que sa colère envers l’agresseur qui a réussi à s’enfuir. Désespérée et inconsolable, Judith se raccroche à Gabriel et le force à l’aider à retrouver le coupable, sans imaginer qu’il a lui-même sa part de responsabilité dans cette tragédie».
C’est ainsi que jeudi dernier, deux scènes différentes ont été tournées Au p’tit lait de Grandval, aménagé en épicerie, créant une animation peu commune dans le village et qui a nécessité la fermeture de la route cantonale pour quelques moments afin que nul bruit parasite de circulation ne vienne troubler le tournage. Les acteurs, réalisateurs et le staff technique se sont retrouvés au Banneret Wisard, voisin d’une autre cinéaste, Lucienne Lanaz qui connait bien les lieux et qui s’est réjouie de leur faciliter la tâche. Elle accueille par ailleurs dans son logement de vacances une équipe technique pendant les deux mois que dure le tournage.
Région mise en exergue
Mais qu’est-ce qui a poussé cette grosse production à tourner ce film dans nos vallées? «Nous recherchions de beaux paysages un peu sauvages et avec du caractère, que nous avons trouvé dans cette région, après bien des recherches», nous dit en substance Beni qui ne tarit d’éloges sur la gentillesse et la disponibilité des gens de nos régions. Le travail a été grandement facilité par les diverses administrations contactées, l’office du tourisme Jura 3 Lacs, les polices bernoise, jurassienne et locale de Delémont ainsi que les populations concernées. Presque toutes les personnes de cette production logent dans le coin, dont une vingtaine dans un hôtel récent de la rue de la gare de Delémont, ce que permet leur budget, pour la période de la durée du film, soit entre le 8 août et le 26 septembre. Une belle aventure qui rapproche l’équipe de production des personnes de nos régions et qui devrait «aider au rapprochement entre personnes de sensibilité différente», glisse encore Beni Lehmann.
Claude Gigandet