Misou Domon est maîtresse d’école ménagère à Moutier et à Saint-Imier. Après quarante ans d’enseignement, elle est à la veille de prendre une retraite anticipée. Mais si elle est connue dans notre région, ce n’est pas seulement pour son art culinaire, mais surtout pour son art musical : c’est elle la chanteuse du groupe Midano qui s’est fait une jolie réputation depuis sa création, il y a cinq ans.
Quand elle accueille ses nouveaux élèves à l’école ménagère de Moutier, Misou Domon leur dit : « Vous avez une vieille cuisine, vous avez une vieille prof, mais nous allons faire du bon travail !» Les élèves protestent : « Mais Madame, vous n’êtes pas vieille ! » Et c’est vrai : Misou porte allègrement ses (presque) 60 ans et garde une allure de jeune fille. Une jeune fille qui pourtant a été bien moins sage que ne le sont la plupart de ses élèves aujourd’hui.
Inscrite à l’Ecole ménagère par sa mère
« Moi, je ne voulais rien faire en sortant de l’école », confie Misou. « Il n’y a rien qui me plaisait. Je n’aimais que rester avec mes potes et écouter de la musique. » C’était l’époque de Genesis, Pink Floyd et Police. Sa mère, qui était couturière, l’inscrit aux examens d’entrée de l’Ecole ménagère de Porrentruy où l’on formait les enseignantes à l’économie familiale, la couture, le dessin et la gym. Sans s’être du tout préparée, elle réussit les examens haut la main et découvre la vie en internat : « J’étais contente de partir de la maison. Et la vie en internat, c’était surtout briser les interdits : sortir par la fenêtre, faire le mur… » Cerise sur le gâteau, elle découvre un domaine qui en fin de compte lui convient bien : « C’est la cuisine qui me plaisait le plus et j’ai commencé à m’intéresser à la diététique. »
Enseignante à Saint-Imier et à Moutier
Toute jeune diplômée, elle est immédiatement engagée à Saint-Imier en 1981, puis à Moutier. Deux écoles où elle enseigne encore aujourd’hui. « J’ai eu à cœur de transformer ce métier en quelque chose de ludique pour que l’école ménagère ne soit plus considérée comme le service militaire des filles », confie Misou. Elle s’est battue avec succès pour que les cours soient ouverts à tous les élèves, y compris les garçons, dès l’âge de 13 ans et pour que l’accent soit mis sur la promotion de la santé. Mais aujourd’hui elle est à la veille de rendre son tablier : « Quarante ans de service, c’est bon ! Je prendrai une retraite anticipée cet été pour faire plus de musique. »
Révélation à La Gomera
Depuis toujours Misou a aimé écouter de la musique. Mais c’est depuis cinq ans seulement qu’elle a aussi voulu en faire. « Nous étions assis sur une terrasse à La Gomera, aux Canaries, et il y avait là des gens qui jouaient de la guitare et qui chantaient tout en mangeant des pommes de terre et du thon, c’était magique », raconte Misou, encore sous le charme de ce moment. Elle dit à son mari Denis : « C’est ça que je veux dans la vie : faire de la musique. » « J’ai une vieille guitare, je te la donne », lui répond-il. Elle le prend au mot et dès leur retour à Moutier, elle se met à la guitare : dix leçons collectives à l’Université Populaire et des tutos sur Youtube : « Je connais quelques accords, mais je suis une autodidacte complète, sans prétention », avoue-t-elle.
Midano
Peu après, chez des amis communs, elle se retrouve avec les Noverraz. On boit, on rit, on chante. Misou entonne une chanson en serbo-croate, Pierre Noverraz sort sa guitare et l’accompagne. Ainsi est né le groupe Midano. « Jamais je n’aurais eu l’idée de chanter en public. C’est Pierre qui m’a mise en confiance », avoue Misou. Aujourd’hui, le duo Midano qui fait régulièrement salle pleine, compte plus de 200 chansons à son répertoire « qui va de la ballade folk à la chanson française en passant par des airs manouches, klezmer, latinos, avec quelques incursions iconoclastes vers le rock, le blues ou même la java » comme le dit son site internet. « Pierre sait tout jouer. Misou sait tout chanter », résume Misou : « On n’a aucune prétention, on fait ça pour le plaisir et pour le plaisir de partager. L’important c’est l’émotion qu’on transmet. »
La pandémie a bien sûr freiné son élan mais Midano a inventé une nouvelle formule : le concert à domicile. Par ailleurs un concert est prévu en juin prochain à la Bibliothèque municipale de Moutier.
Claudine Assad
